De Berastagi nous avons partagé un taxi pour aller à l’embarcadère (Parapat) du Lac Toba, seulement trois heures de route, ouf! Une demi heure de traversée et le bateau nous laisse devant notre GH, Romlan à la ville de Tuk Tuk. Nous nous trouvons sur une île très particulière dans le lac le plus grand de l’Asie du Sud-est.
Une superficie de 1707km2, formé après une explosion volcanique il y a plus de 75.000 années. D’après ce que j’ai lu l’éruption la plus violente depuis les derniers millions d’années. Peut-être responsable de la dernière ère glacière. Le lac se trouve à 900 m d’altitude et est profond de 500m. Etant un lac volcanique l’eau n’est pas froide, ce qui laisse également supposer qu’il y a encore de l’activité quelque part dans ses ténèbres. Et au milieu de ce lac immense, une île de la grandeur de Singapour, l’île Samosir, rejetée des entrailles du volcan pendant la dernière explosion. Ici la population est Batak comme à Brastagi, mais le style des maisons est légèrement différent, c’est le style Toba Batak.
Les gens étaient anthropophages jusqu’au 20ème siècle. On ne mangeait pas n’importe qui n’importe quand, plutôt des ennemis capturés, ou bien quand on avait jugé une personne pas digne d’une être humain dans un tribunal populaire. On attachait la victime à une potence et commençait à la découper encore vivante en la frottant de piment, avant de lui trancher la tête, sympa comme histoire n’est pas ? Maintenant la population est en majorité chrétienne protestante, les missionnaires sont passés par là au 19ème. Les gens ont instauré un genre chrétien mystique, mélangeant leur ancienne culture animiste avec le chrétien. On le voit avec leurs sépultures familiales qui se dressent partout dans les champs.
Il y en a de très belles, le culte des ancêtres.
On trouve ceci également chez les peuples du Pacifique. Je trouve d’ailleurs que les décorations des maisons Bataks en rouge et noir ont des ressemblances avec les maisons Maoris en Nouvelle Zélande. Ce sont des navigateurs après tout donc tout est possible. Nous sommes restés tranquille dans notre chambre avec balcon face au lac le premier jour
et ensuite nous avons loué une moto pendant trois jours pour faire le tour de l’ile qui fait quand même 40 km de long et 20 km de large. L’île est très paisible
ce qui nous fait du bien après le bruit de la ville. Les gens vivent encore très majoritairement dans des maisons traditionnelles batak,
regroupés dans des petits hameaux.
Les toits sont maintenant en tôles rouillées
en non plus en végétal comme avant. Par contre quand ils construisent une maison plus moderne en dur, le toit finit la plupart du temps en forme batak. Comme je disais leur croyance est un mélange de l’animisme et du christianisme, ce qui fait que leurs églises reflètent parfaitement ceci, autant de symboles du temps des ancêtres que de représentations de Jésus ou la Vierge dans le cas d’une église catholique par exemple.
Les deux premiers jours le temps n’était pas très clair, plutôt brumeux. La cause n’est pas la météo mais les feux du sud de Sumatra. Avant de faire de nouvelles plantations de palmiers à l’huile ou d’autres cultures, on brûle les champs et on fait de même pour les ordures domestiques. Ces feux prennent tellement d’ampleur qu’ils envahissent tout le pays. On l’avait déjà constaté dans la jungle. On en souffre aussi dans le sud de Malaisie, ils sont souvent obligés de fermer les écoles, tellement qu’il y a de la fumée. Pascal est assez frustré parce qu’impossible de prendre des belles photos dans ces conditions.
Nous sommes en haut de la montagne
mais la vue est obstruée.
Ceci ne nous empêche pas de circuler un peu partout et d’admirer les maisons avec leurs sculptures et peintures.
Les seins sont un signe de fertilité,
ce qui change un peu des phallus qu’on voit d’habitude dans les pays primitifs, le gecko est pour protéger la maison. Il y a trois couleurs pour peindre la maison, même si ceux qu’on voit n’ont pas tous gardé leur peinture d’origine: Rouge pour le monde humain (le sang je suppose), blanc pour les bons esprits et noir pour les ténèbres. Chaque maison a un panier pendant du toit avec une colombe.
Je ne l’avais pas remarquée au début, après j’en ai vu partout et je me demandais comment cela se faisait qu’elle ne s’envolait pas. Bon tout simplement parce qu’elles ont un fil à la patte…C’est une variante à la cage d’oiseaux que l’on a vu au Myanmar entre autres. Il y a beaucoup de buffles ici, on les utilise pour travailler dans les champs, mais en ce moment ils sont plutôt au repos,
se vautrant dans la boue par exemple.
Normalement leurs cornes poussent vers le haut, mais nous en avons vu quelques uns avec les cornes tombantes.
Je ne sais pas si cela rajoute à leur valeur. Je crois qu’ici également le buffle est un signe de richesse. Dans l’ensemble les animaux se promènent en liberté, mais de temps à temps un voit un cochon avec une entrave pour pas qu’il s’éloigne trop.
La vie se passe en communauté, comme par exemple ces femmes qui nettoient leurs légumes ensemble en fin de journée.
Elles étaient assez contente qu’on s’arrête et pas de problèmes pour les prendre en photo.
Dans le village de Tomok il y avait marché. Des étals de poissons du lac frais
ou séchés
, des fruits comme celui-ci, le salak ou fruit de serpent.
Ou bien une bassine plein de combavas.
Je ne sais pas pourquoi on les garde dans l’eau. Le combava est d’origine indonésienne, des îles Moluques, où on l’appelle Sombawa. On n’utilise pas la chair, seulement les feuilles ou le zeste qui est très parfumé, entre la citronnelle et le citron. Très bon pour une vinaigrette! Egalement d’origine d’ici est la rose de porcelaine. Nous l’avions découverte en Guadeloupe où on la cultive pour faire des bouquets, ici on la mange et on la trouve donc avec les légumes.
Comme Pascal avait déjà remarqué, les brouettes ici servent à autre chose, pleins de gros avocats par exemple,
ils sont vraiment bons. C’est à Tomok également que se trouve le sarcophage du roi Sidabutar,
de sa femme et de son garde du corps. C’est ce roi qui s’est converti au christianisme, d’ailleurs le missionnaire qui est responsable de ceci repose dans une tombe à côté, sans nom.Les plantations comme le riz, suivent les courbes de la montagne en espaliers.
Cette île ne manque pas vraiment d’eau, d’abord il y a l’eau du lac bien sûr, mais il y a également beaucoup de sources naturelles et les gens en profitent pour récupérer l’eau pour l’alimentation. Ils l’utilisent également pour la lessive comme sur cette photo.
Notre dernier jour de moto, le dimanche on voulait aller à la sortie de la messe pour voir si les gens étaient bien habillés pour cette occasion. Ce n’était pas partout le cas, mais dans une petite église de campagne les dames étaient toutes très élégantes. Dans ce cas je n’ose pas trop aller m’approcher et demander une photo, mais Pascal a moins de souci avec ça que moi et il a bien fait, elles étaient contentes qu’il les prenne en photo.
A part le tourisme et la culture de riz et légumes pour la consommation locale, l’île fait de l’élevage de poissons dans le lac pour export. Un des pêcheurs nous a dit que c’était une société Suisse qui chapotait tout ça.
C’est une source de revenu, mais également un risque de pollution pour le lac bien sûr. Concernant le tourisme, il y a une vingtaine d'années, c’était un haut lieu des baba cools ici, on en voit des traces encore, mais depuis l’île a retrouvé son calme, pour notre bonheur à vrai dire. Nous avons pris nos habitudes et mangeons souvent dans un petit restaurant d'un jeune couple qui nous font de la très bonne cuisine locale, surtout son chapatti au avocat et son saté, le meileur de l'île paraît-il (Tio et Alex au Horas Shugary). Le matin Pascal se lève pour voir le soleil sur le lac.
Nous profitons donc d’une baignade dans cette grande piscine naturelle
et d’une vue imprenable de notre chambre
et balcon.
Anita