Nous quittons les régions de montagnes pour les bords de l’océan Indien et nous souhaitons nous rendre à Nagari Sungai Pinang qui est un village de pêcheurs au sud de Padang. Les déplacements à Sumatra sont souvent assez compliqués et se fut de nouveau le cas. Nous avons dans un premier temps rejoint Padang depuis Bukittinggi en deux heures et demie et après autant pour regagner le village. Les derniers kilomètres se faisant sur une route assez défoncée. Nous avons choisi cet endroit car c’est là que se trouve la guesthouse de Ricky et Anne un jeune couple franco-indonésien. Leur site est: http://fr.authenticsumatra.com/ ,
Ricky est originaire du village et il a souhaité ouvrir une guesthouse pour développer le tourisme et en faire profiter les villageois. Une part du coût de notre séjour servant à financer la scolarité des enfants qui doivent aller à Padang pour les études secondaires. Le village est loin de tout et l’enseignement n’est pas toujours dispensé. Les constructions de la guesthouse sont directement sur la plage et c’est un problème.
En effet en 2013 une grande vague a fait reculer le bord de plage de 18 mètres. L’embarcadère pour les bateaux était assez loin comme on peut voir sur cette photo.
Si un tel phénomène se reproduit, se sont les bungalows ou nous étions qui disparaitrons. La nuit nous entendions la mer venir taper contre ce mur de sable qu’elle a formé. C’est très impressionnant et ça fait même peur car sur des vagues un peu fortes le logement bougeait. Normalement un déménagement doit se faire dans la baie juste à coté, avec les bungalows un peu plus en retrait de la mer. Le village de Nagari Sungai Pinang est essentiellement consacré à la pêche traditionnelle.
Dans la journée les pêcheurs tirent les très longs filets.
La technique qu’ils emploient est très différente de ce que j’avais vu auparavant. Ils ne tirent pas les filets avec les mains tout le temps. Ils accrochent le filet avec une corde et une sangle qu’ils ont attachées à leur taille.
Ils reculent au fur et à mesure, arrivé à une certaine distance, le dernier se détache et vient se positionner devant et ainsi de suite. Les filets pèsent très lourds car ils sont longs. Le terrain de football sert à dérouler ces derniers.
Ils mettent plusieurs heures pour positionner les filets et les tirer. Le résultat n’est pas toujours à la hauteur du travail effectué.
Parfois il n’y a rien et le partage du poisson est vite fait.
Quand le filet est bien garni, les hommes rentrent à l’intérieur
avec de grosses bassines pour mettre le poisson.
Après il sera partagé entre les familles. Les enfants sont aussi là pour la fin de pêche.
Ils essayent d’avoir du poisson pour leur famille. Si le filet présente des trous, leurs petites mains grappillent quelques poissons en cachète. Les petits poissons sont mis à sécher
et seront utilisés pour faire le « sambal trassi », c’est une préparation de piments avec les poissons. Les bateaux sont à double balancier,
pour la pêche de nuit au large. Il y en a aussi des plus petits pour remonter la rivière
et aller sur les îles. Pour mettre les filets, se sont des barques normales,
l’ancre le plus souvent est faite de bois avec un gros caillou.
Les filets de toutes sortes sèchent dans le village, il faut aussi les réparer et en faire de nouveaux.
Toute la vie est tournée vers la pêche mais le village dispose aussi à l’arrière, entre les montagnes, de rizières communautaires. La récolte sera là aussi partagée. Nous sommes passés dans ces belles rizières ou les buffles prenaient leur bain de boue,
on se serait cru à Dax ! Lors d’une sortie,
Anita aussi a pris son bain de boue. Mais où est donc passée ma deuxième tong ?
Dans la forêt, les hommes abattent les marantis. Après ils débitent sur place ces grands arbres et taillent à la tronçonneuse de très longs chevrons.
Ces derniers sont acheminés au village pour la construction de maisons. Pour les ramener, ils utilisent des rondins
et les buffles pour tirer ces longueurs de bois. Nous avons fait doucement ces quelques jours. Rien de bien prévu, seulement profiter de cet endroit si tranquille. Le village est paisible et les habitants vaquent à leurs occupations
sans trop s’occuper de nous.
Certains nous parlent un peu mais la barrière du language réduit les échanges. Nous avons quand même rencontré un sculpteur sur bois qui était très intéressé pour apprendre le français. Il marquait des phrases en anglais et après Anita lui traduisait en français. Ensuite il écrivait phonétiquement pour qu’il puisse les redire.
C’était marrant car il demandait des phrases pour se présenter ainsi que son métier. Il était plein d'enthousiasme. Les enfants veulent eux être sur toutes les photos.
Ils sont toujours après nous et veulent parler.
J'ai même prêté mes lunettes et ma casquette le temps d'une pose.
Un soir nous avons été rejoindre Sébastien qui est un passionné d’insectes et plus particulièrement de coléoptères. Il avait mis une lampe spéciale et tendu un drap blanc pour la chasse nocturne.
Sumatra possède des variétés endémiques et il espérait bien en attraper. Un très bon moment passé avec lui, il parle de sa passion avec tellement d’envie que c’est un plaisir à l’écouter. Il était là avec un autre éducateur marseillais car ils ont un projet de construction d’une maison pour les jeunes du village. Un partenarial franco indonésien en quelque sorte entre leur association A.p.a.s.h.e et Authentique Sumatra. Les journées étaient faites de baignades
ou balades au alentour du village. Une sortie sur les îles
nous a permis d’apprécier la clarté de l’eau
et de faire un peu de snorkeling.
Les fonds sont riches en poissons et c’était une bien belle sortie
avec de splendides paysages insulaires.
Parfois on souhaiterait que le temps s'arrête pour comtempler encore plus longtemps.
En rentrant, le soleil nous a accompagnés et gratifiés de son couché si coloré sur l’océan argenté.
En soirée c'est une ambiance musicale à la guesthouse, les jeunes aiment chanter et jouer de la guitare et en plus ils le font bien.
Le matin j’aime bien me promener seul dans le village. Cela me permet de mieux observer la vie de chacun. J’ai fait un tour vers l’école, elle n’est pas très grande. Quelques écoliers étaient en chemin et m’ont salué avec des « Hello Mister ». J’ai fait une photo de la classe
et je n’avais pas vu l’institutrice dans un coin. Elle non plus d’ailleurs ne m’avait pas remarqué. Elle était là devant le squelette humain avec son livre dans les mains
et j’ai ressenti une grande solitude de sa part. J’avais l’impression qu’elle découvrait ce squelette et qu’elle apprenait les différentes parties avant de passer son savoir aux enfants. Après j’ai un peu discuté avec elle et j’étais rassuré quand elle m’a dit qu’elle était du village. Je pensais que tous les enseignants venaient de Padang. Ici rien n’est vraiment simple, il y a un manque de moyens dans tous les domaines. C’est tellement dommage de savoir le gaspillage qu’il y a dans nos pays industrialisés alors qu’il y a tant de besoins dans des régions comme celle-là. J’ai regardé les maisons du village, elles sont souvent en bois
et très simples. Elles ne possèdent pas de fenêtres comme chez nous
mais l’intimité y est toujours préservée.
Nous sommes toujours au pays Minangkabau et donc musulman, ce qui fait que nous avons droit aux prières journalières. C’est quand même une contrainte pour celui qui n’est pas musulman que d’être obligé d’entendre cela. Pour ma part cela ne me gène pas car je suis de passage et je m’adapte mais pour celui qui vit ça au quotidien c’est différent. Un matin un petit python avait élu domicile pas loin de mes chaussures,
Bernard, un touriste comme nous l'a capturé et il a été déposé plus loin dans la forêt. Nous avons bien apprécié cette escapade au bord de l’océan, l’air y est chaud mais très supportable avec le vent marin. La vie s’étire lentement
et chaque jour se ressemble. C’est bien pour se reposer, pour y vivre c’est surement autre chose…mais peut être que tout s’apprivoise avec temps et patience…
Pascal